1. Le Globe de Bristol. Pourquoi il s’adresse aux deux. Foule nocturne. La mère le matin. Le cahier. Le gamin tatoué. Le camp en feu. Tirez- vous ! Eleanor and her boys. Nom de Dieu, comment vous voulez que je me concentre là-dedans !
Le père est accroupi derrière le volant de sa fourgonnette roulotte, bouteille à portée de main, un cahier qu’il n’arrête pas de raturer sur les genoux.
J’allais terminer un chapitre cette nuit, mais avec le bazar qu’ils ont mis, j’ai écrit juste une esquisse ! Pourtant Bristol a toujours été super ! Les gosses, L’Île au trésor, ça vous dit quelque chose, et le mousse Jimmy Hawkins ? Il s’adresse aux deux parce que, comme il dit, il veut les encourager à parler. Le bébé en grenouillère et celui qui a grandi.
Et tu sais ce qui est marrant ? il se tourne vers Sonia en train de chauffer une cuiller à la flamme du réchaud. Sur l’autre feu elle remue mollement la purée du petit.
Maintenant c’est plutôt à Long John Silver que je m’identifie !
Ça doit être une affaire d’âge, poursuit la mère en pleine cérémonie matinale, après avoir retroussé la manche de son chemisier orné d’un mandala bigarré.
Et le cahier du père, gribouillé et barbouillé de taches de café, de vin, s’envole au-dessus du petit encore endormi et tombe au milieu des affaires. Il étire les jambes, cale la nuque contre l’appuie-tête et se détend. Il balaie le campement nomade du regard. Il porte un maillot maculé et un bermuda, ses yeux brillent du feu inextinguible de la curiosité. La tête de l’histrion est coiffée d’un bonnet d’où s’échappent des cheveux roussâtres mêlés de mèches grises.
Il observe la porte d’entrée du camp, une minuscule réplique du théâtre du Globe où une quantité immense de petites ampoules, qui ne s’allument évidemment que le soir, forme le nombre 400, éclairant un portrait un peu comique du dramaturge et le texte his words : wisdom, freedom and beauty !